Allongée dans son lit, Ava regardait à travers la fenêtre, là où Olympe avait tiré le rideau, quelques heures auparavant. Un geste qui était venu dans le vain espoir de faire sortir sa sœur du lit. Sans succès. Avalon ne voyait pas pourquoi elle aurait à bouger du lit. L’école lui avait donné des vacances forcés et elle avait rempli assez de paperasses pout tout le reste de sa vie. C’était d’ailleurs assez incroyable de voir à quel point l’administration était casse-pied en cas de décès. Et encore plus lorsque la personne qui venait de mourir était un criminel. Entre l’enquête, l’autopsie et les révélations, Avalon en avait remplie des formulaires. Pour l’assurance, les pompes funèbres, pour récupérer son corps à la morgue. Maxim avait réussi à lui compliquer méchamment la vie. Et dire que durant des années elle avait cru qu’il était l’une des meilleures choses de sa vie. Elle s’était trompé. Et bien correctement. Avalon ne savait même pas à qui elle ne voulait le plus. Elle pour s’être laissée embobiner, ou son mari pour lui avoir fait croire à tout ses mensonges. La trahison était un sentiment qu’elle avait bien du mal à gérer. Si Max avait été encore là, elle aurait au moins pu lui gueuler dessus, le virer de sa maison et se défouler sur ses affaires. Se défouler sur ses affaires, elle l’avait fait. Enfin avant de craquer et d’enfiler une de ses chemises pour dormir avec son odeur. C’était sans doute ça le plus dur à gérer, ses sentiments contradictoires. Elle en voulait à Max, le détestait et de l’autre côté… Il lui manquait tellement. Elle avait tellement aimé cet homme. Elle ne l’aurait jamais épousé sinon, elle n’aurait jamais été prête à adopter avec lui. Comment démêler le vrai du faux maintenant ? Chaque moment passé avec lui était décortiqué dans le moindre détail dans la tête. C’était sans fin. Sans doute ce qui faisait qu’elle ne quittait pas son lit. Elle ne répondit que vaguement qu’à Oly lorsqu’elle lui annonça qu’elle allait faire quelques courses. Olympe gérait la maison depuis son arrivée ici. Et même si Avalon s’en rendait compte, elle n’avait pas le courage de remercier sa petite sœur. Elle voulait être seule, mais Oly et Lincoln ne semblait pas être du même avis. Ils semblaient même avoir programmé des tours de gardes. Comme si elle était une enfant malade. Au moins, elle allait pouvoir se complaire un peu dans sa solitude.

Puis on sonna à la porte. Ava tenta de l’ignorer une première fois, avant qu’on ne sonne une deuxième fois, avec bien plus d’insistance. Elle poussa un long soupir avant de soulever la couverture. Elle n’était vêtue que de la chemise de Maxim, elle attrapa alors un vieux pantalon de pyjama qui trainait là pour ne pas ouvrir les jambes nus. Ils ne manqueraient plus que ce soit le facteur. Elle descendit donc les escaliers et jeta un œil dans le judas de la porte. Ce n’était pas le facteur. C’était Juliet. Elle avait oublier qu’il y avait une troisième baby-sitter dans l’histoire. Avalon lui ouvrit tout de même la porte. Et dire qu’il y a à peine une semaine, elle aurait sauter au cou de sa meilleure amie, juste trop heureuse de la voir. Il faut croire qu’en détruisant sa vision de leur mariage, Maxim avait réussi aussi à abimer son amitié avec ses meilleurs amis. « Salut Juliet. Je suppose qu'Oly t'a appeler. » Il faudrait peut-être qu'elle rappelle à sa petite sœur, qu'elle était la plus jeune et qu'elle n'avait pas à la surprotéger. Même si elle était dans un état lamentable.

Ava aurait tout de même faire un effort pour accueillir son amie d’une manière un peu plus joyeuse. Après tout, Juliet était sa meilleure amie de toujours, celle sur qui elle avait toujours compter et qu’elle avait toujours été heureuse retrouver. Mais il fallait croire qu’elle n’avait pas envie d’être joyeuse. Elle venait de perdre son mari. Et de découvrir qu’il avait passer sa vie à lui mentir. Elle hésitait encore entre la tristesse et la colère. Alors en attendant de se décider sur laquelle des deux émotions étaient le meilleur choix, elle préférait restée dans son lit. Et quiconque l’en sortirait, n’aurait pas affaire à la gentille Avalon de d’habitude. « Oly, Lincoln. Allez, laisse-moi entrer. » Ju l’a pris alors dans ses bras et l’espace de quelques instants, Ava se laissa aller, profitant de cette étreinte. Finalement, elle avait peut-être plus besoin des autres qu’elle ne le pensait. Elle avait tellement pleurer déjà, elle en avait marre, elle ne voulait pas encore craquer. Sans doute la raison pour laquelle elle repoussait ses proches. Les laissez la consoler était le meilleur moyen pour craquer de nouveau. Alors être seule était sans doute la meilleure chose à faire.

Juliet passa la porte, n’attendant pas la permission de son amie, sachant pertinemment qu’elle ne l’aurait pas de toute manière. Elle se dirigea vers le salon et Ava la suit. Avant que cette dernière ne se stoppe alors que Ju s’installe sur le canapé. Elle vient de tomber sur son reflet dans le miroir du salon. Elle a une tête affreuse. Elle regarde un instant cette inconnue dans le miroir. Parce que oui, elle ne se reconnait pas. Elle se demande un instant si de toute manière, c‘est si grave que ça. « Alors ? Tu comptes rester longtemps au lit ? A te morfondre ? » Ava lâche un soupir. Apparemment, Juliet n’a pas l’intention d’utiliser la même méthode que sa sœur et Lincoln. Elle a sa manière à elle, un peu plus violente. Avalon vient poser ses fesses sur le canapé à son tour. Elle ne sait pas vraiment ce que Juliet attend d’elle. Après tout, à la mort de Lexie, elle avait été dans le même état. « L’école ne veut pas de moi avant au moins deux semaines. Et encore si les parents d’élèves découvre que j’étais mariée à un braqueur de banque, ça risque même d’être pire. » Les parents pouvaient se montrer idiots quand il s’agissait de leurs progénitures. Ava avait même eu une mère qui avait un scandale parce qu’elle ne comprenait pas pourquoi sa fille n’était pas la première de sa classe. Et Ava enseignait en maternelle. Elle n’imaginait même pas ce que devait subir ses collègues de primaires qui donnaient de véritable notes. « Alors pour le moment, rester dans mon lit à me morfondre me parait être la meilleure solution. » En réalité, elle aurait préféré pouvoir continuer à travailler. Elle aurait eu au moins une chose sur laquelle se concentrer. En dehors de son menteur de mari. « Je comprends pas ce que vous voulez que je fasse ? Je devrais continuer à vivre normalement ? Faire comme si de rien n’était ? » Au moins, rester au lit était peut-être plus sain que de bruler toute les affaires de Maxim, comme elle avait faillit le faire. « Si je sais ce que je pourrais faire. Nous faire du thé. C’est bien du thé, non ? » Elle se leva et se dirigea vers la cuisine, sans laisser le temps à Juliet de lui répondre. Elle avait pas envie de parler de ses états d’âme, de Maxim et de tout le reste. Elle voulait juste trouver le moyen de stopper cette incroyable douleur qui ne la quittait plus. Elle mit alors en route la bouilloire. Sur une des chaises hautes qui encadraient le comptoir, se trouvait un vieux gilet qui trainait là. Elle l’attrapa et l’enfila avant de s’emmitoufler dedans, comme s’il pouvait la protéger de la conversation que Ju allait la forcer à avoir.

Se morfondre dans son lit, s’était ce qu’Ava avait trouvé de mieux. Alors qu’on l’en sorte, avait le don de l’agacer. Ce qui expliquait sa manière d’accueillir sa meilleure amie. Et de lui répondre. Pas d’une manière franchement amicale. Mais Juliet ne semblait pas lui en tenir rigueur, après tout, si elles étaient toujours aussi proches l’une de l’autre c’est qu’elles avaient appris à passer au dessus de ses moments. Parce qu’en trente ans d’amitié, il était évident qu’il y avait eu des périodes où chacune avait été insupportable avec l’autre, pourtant, elles avaient continués à être les meilleures amies du monde. Et ça faisait peut-être un peu cliché, mais c’était ça entre elles, à la vie, à la mort, même si en ce moment, ce n’était pas vraiment ça. « C'est pas la bonne solution, Ava et tu le sais. Dans deux semaines, tu vas reprendre l'école. Et ca va te faire du bien déjà. Mais essaie de t'y préparer tout doucement, de recommencer à sortir un peu, de voir du monde. On a qu'à tous dîner ensemble ? » Avalon eut un rire dur. « Bien sûr, passons une soirée tous ensemble. J’ai déjà un superbe sujet de conversation, Maxim et ses secrets. » Elle leva les mains au ciel, exaspéré. Elle n’était pas prête à retrouver sa vie sociale. Elle en était encore au stade de porter les chemises de son mari et à chercher son odeur dans leurs draps. Avalon préféra donc fuir dans la cuisine pour faire du thé. « Le thé, c'est bien. Mais nous n'avons pas fini cette conversation. » Ava avait bien sentie la frustration dans la voix de Juliet. La même que sa mère quand elle était encore ados. Dans d’autres circonstances elle aurait peut-être rit en se comportant comme une adolescente mais elle n’en avait pas vraiment envie. Elle avait plutôt envie d’enfiler son gros gilet de mémé -comme l’appelait Maxim a une époque- et faire chauffer cette eau. Un thé, c’était vraiment ce dont elle avait besoin. Mais bien vite, elle fut rejoint par Juliet. « Tu n'es pas seule, je suis là. On est tous là pour toi. Et tu es forte, plus forte que n'importe qui. Je sais que tu vas te relever. Je ne te demande pas de me sourire maintenant, de me promettre que tout ira pour le mieux. Je sais que ça sera long et difficile ... Mais tu peux le faire. » Ava, elle en doutait. Pour le moment, elle était au fond du tunnel et n’en voyait pas la sortie. Ne cherchait pas la sortie. « Tu vas surmonter tout ça. Ses mensonges, ton sentiment de vide, ce deuil. Sois patiente et surtout, continue de croire en toi, en la vie. » Avalon fixa un petit moment Juliet, partagé entre l’envie de la prendre dans ses bras et celle de partir en courant. Heureusement pour elle, la bouilloire se mit à siffler, signifiant la fin du temps de chauffe. Ju alla prendre des tasses, elle connaissait la cuisine presque aussi bien que la sienne, tandis qu’Ava alla prendre la bouilloire. Les sachets de thés étaient déjà sur la table. Ils ne quittaient jamais la table. Elle remplissait  les deux tasses et choisissait un sachet, un peu au hasard. Elle aimait tout les thés de toutes manière. Elle le laissa infuser. « Tu sais, je crois que le pire c’est que je ne saurais jamais ce qu’il pouvait bien penser. Il me cachait tellement de choses et si en réalité, il ne m’avait jamais aimé. Si je n’étais qu’une couverture pour ses activités illégales ? » Ava secoua la tête en passant une main dans ses cheveux. Elle ne le saurait jamais. Tout comme Gram ne saurait jamais si Lexie l’avait vraiment trompé ou pas. Mais contrairement à son ami, elle voulait savoir. Parce que s’il l’avait vraiment aimé, elle pourrait alors passer au dessus de la trahison et prendre soin des souvenirs qu’ils avaient partagés. S’il ne l’avait jamais aimé, elle pourrait laisser la colère s’exprimer et le détester pour le reste de sa vie. « Je sais plus ce que je dois penser, Ju. Ni ce que je dois faire… Alors, croire en moi ou en la vie, c'est un peu compliqué. »